Menu

Introduction

Alors qu’il séjourne durant l’été 1949 avec ses amis surréalistes sur l’île de Sein en Bretagne, Benjamin Péret (1899-1959) écrit entre le 15 et le 23 juillet un long poème retraçant son amitié avec André Breton (1896-1966). Il l’intitule Toute une vie.

Toute une vie : depuis leur rencontre en 1919, leurs vies se sont déployées parallèlement, chacun prenant une part active à l’agitation artistique et politique de l’entre-deux-guerres jusqu’au choc du second conflit mondial qui les tient longtemps séparés, dans l’exil outre-atlantique.

Toute une vie : quoique ni l’un ni l’autre ne soit en 1949 au terme de son existence, leurs vies passées à dialoguer, à s’enthousiasmer, à se révolter, à inventer, à jouer, à mettre en commun leur pensée avec d’autres donnent le sentiment d’une rare plénitude amicale et intellectuelle.

Toute une vie : ces deux vies se distinguent bien sûr, puisque André Breton et Benjamin Péret vont agir et penser singulièrement dans leur époque tout en faisant front commun au nom du surréalisme, c’est-à-dire en ne perdant pas de vue cette double exigence de « changer la vie » (Rimbaud) et de « transformer le monde » (Marx). Mais composer le récit de cette amitié surréaliste, où l’un n’éclipse jamais l’autre, revient avant tout à saisir ce qui les « rassemble en grains d’un même épi ».

Elisa Claro Breton, Benjamin Péret et André Breton à Saint-Cirq-Lapopie © succession Elisa Claro Breton, courtesy Association Atelier André Breton
Elisa Claro Breton, Benjamin Péret et André Breton à Saint-Cirq-Lapopie © succession Elisa Claro Breton, courtesy Association Atelier André Breton
Elisa Claro Breton, André Breton et Benjamin Péret sur l'Île de Sein, 1948 [1949 ?] © succession Elisa Claro Breton, courtesy Association Atelier André Breton
Elisa Claro Breton, André Breton et Benjamin Péret sur l'Île de Sein, 1948 [1949 ?] © succession Elisa Claro Breton, courtesy Association Atelier André Breton

Breton et Péret comblent un manque réciproque. À partir d’une identité de vues intellectuelles et affectives, sur un même terrain, chacun développe des éléments particuliers pour former un fruit commun, complet, parfait. C’est ainsi qu’après avoir évoqué, au cours du poème « Toute une vie » dédié à André Breton – un des plus beaux poèmes qu’un homme n’ait jamais écrit pour un autre homme, son ami – la liberté « couleur d’homme » que le Manifeste du surréalisme avait soudain libérée et relâchée sur le monde, Péret a ce cri significatif : « C’est cela André qui nous rassemble en grains d’un même épi. »

Claude Courtot : « Les Grains d’un même épi. André Breton-Benjamin Péret », Cahiers Benjamin Péret, n° 2, septembre 2013.

Chapitre suivant :

Toute une vie

Sommaire de l'exposition